Histoires bêtes

27/10/2005 in Non classé | Comments (0)

Lundi au métro Mont-Royal j’ai été séduit par un chien. Je revenais de Sainte-Thérèse. J’attendais la 97 pour me rendre nager au Stade olympique. Au milieu de l’après midi, la 97 passe seulement aux vingt minutes, alors pour tuer le temps, j’ai été appeler le répondeur d’une baise potentielle. De la cabine téléphonique j’ai vu le chien. Un chien moyen à oreilles pointues avec une belle gueule. Les punks qui couchent dans la rue ont souvent des chiens de cette sorte-là. Le chien est arrivé tout seul de la rue Rivard sans maître sans laisse avec un air de chien qui sait où il va. Il est allé sentir des gars qui se tenaient près de l’édicule du métro. Peut-être des dealers. Il a continué vers un groupe de filles. Il branlait de la queue. Les filles et le chien devaient se connaître.

Sur l’esplanade devant le métro, un type a commencé à déballer un attirail. Il avait un drapeau brésilien pour se décorer. J’ai pensé: «ah non, il va pas jouer de la musique.» Il faisait froid, très gris et il bruinait.

Un couple genre Plateau est arrivé sur l’esplanade. Le genre de gens qui doivent avoir une place pour passer leur fin de semaine en dehors de la ville. Mais je les juge vite. Je ne les ai pas vraiment regardés. C’est leur chien qui a attiré mon attention. Un chien énorme qui a senti le chien de rue à 150 mètres de distance. Il s’est mis à japper, à trépigner et à tirer sur sa laisse. Le chien de rue le regardait en restant impassible. Il s’est avancé un peu pour qu’on le voit mieux. Il s’est couché sur le béton pour prendre le frais. C’est là qu’il était le plus beau.

Je suis dans une mauvaise phase avec les chiens. Il y a quelques semaines, je faisais du courrier un vendredi stressant. J’étais fatigué. Dans la rue tout le monde était agressif. Chez Parbus, il a fallu que j’attende un colis une demi-heure. Tous les clients attendaient des colis depuis des demi-heures. Des chargements de colis se rajoutaient au chaos à chaque autobus qui arrivait. J’avais un nom de l’expéditeur et un numéro de way-bill, mais pour la mauvaise organisation de Parbus, ces informations-là ne suffisaient pas encore. Le gars épuisé au comptoir en a profité pour se défouler et me renvoyer en arrière de la file d’attente.

Toutes les enveloppes que j’avais dans mon sac étaient urgentes. Il pleuvait. Dans un bureau des usines Angus où j’allais chercher un dernier rush, j’ai été accueilli par un chien pas attaché qui s’est mis à japper. J’ai sacré à pleine gorge. Qu’est ce qu’un osti de chien fait dans un bureau? La femme en arrière du bureau était furieuse que je sacre. Une cliente à nous, qui nous appelle pour qu’on lui livre ses lettres. Elle est gravement déséquilibrée. Elle a besoin d’un animal comme substitut émotif. Même qu’elle a besoin de l’amener à sa job. Moi je suis zoophobe exterminationiste. Au strict minimum, il devrait y avoir une ceinture d’abattoirs autour de Montréal, pour qu’aucune forme animale ne parvienne à nous autrement qu’emballée sous vide dans des sacs de plastiques transparents, vendus à tant de la livre. La morale de cette histoire est qu’il ne faut pas brailler au travail. Brailler, c’est pour les enfants. Les adultes, eux, transpirent.

Un autre vendredi où j’étais cette fois d’excellente humeur, j’ai eu commerce avec un chat. Un chat superbe, avec des beaux yeux. Il était réfugié de la pluie dans un portique et il miaulait pour que la porte s’ouvre. J’ai sonné. Le chat est entré comme si il était chez lui. La destinataire de la lettre manquait de mains pour signer le bon de livraison et pour retenir le chat en même temps. Elle m’expliquait avec un gros accent qu’elle n’avait jamais vu ce chat-là. Je me retenais pour ne pas lui répondre en anglais. J’aime bien constater que je suis bon en anglais. Et aussi, j’aime bien parler en anglais.

La saison de la pluie se continuait, avec les nids de poule transformés en lacs. Je me suis fait confier la livraison d’une lettre extrêmement urgente à ramasser au 10 Sherbrooke ouest. J’ai perdu des précieuses minutes à chercher l’adresse, indiquée nulle part. J’ai fini par trouver ce que je cherchais: la salle de presse du festival Chamberland, au fond de l’hôtel Godin. Le type à l’entrée n’a pas compris ma question: c’est quoi l’adresse ici? J’ai répété ma question en anglais avec beaucoup d’impatience dans la voix. J’ai reconnu son accent allemand trop tard. J’aurais pu lui dire: «Ich bedauere, so ungeduldig mit Ihnen, gewesen zu sein.» Je regrette d’avoir été impatient. C’est pas de sa faute, si cet édifice est trop in pour écrire son adresse.


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